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Louise : « Depuis l’annonce de ma maladie, j’ai décidé que je vais guérir » 

by | May 17, 2022 | Au fil de l'eau, Dernières prises

L’été de ses 21 ans, Louise apprend que le kyste « bénin » qu’on vient de lui retirer était en fait une tumeur. Depuis, cette jeune miss de Nouvelle Aquitaine poursuit son combat contre un cancer de l’ovaire gauche. Sur ses réseaux sociaux, elle raconte son histoire sans filtre, armée d’une positivité communicative.

« Solaire, je suis un peu le clown de la famille » voilà comment Louise se présente. Native de Bordeaux, c’est une jeune femme tournée vers les autres, dont la vocation est de devenir professeure des écoles. Sociable et créative, elle partage ses aventures voyages et mode sur les réseaux sociaux. Elle a même tenté l’expérience Miss France : c’est la deuxième dauphine Miss Médoc 2021. Aujourd’hui, elle utilise son compte Instagram pour parler de son cancer.

Pourquoi as-tu décidé de parler de ton cancer sur Instagram  ?

J’ai longtemps hésité à en parler. C’est quand j’ai commencé à avoir un peu d’espoir sur mon cas que j’ai voulu montrer qu’il ne faut jamais baisser les bras. Au début, moi, j’avais aucun espoir. Franchement je pensais que je ne guérirai pas. Finalement ça se passe plutôt bien donc j’ai voulu permettre à des personnes dans mon cas de pouvoir s’identifier à moi. Aujourd’hui, j’utilise mon compte Insta pour lever le tabou sur cette maladie, il faut en parler davantage. Et surtout, s’apporter du soutien mutuellement.

On voit ta positivité sur les réseaux, mais j’imagine qu’il y a forcément des moments où tu flanches un peu… où puises-tu ta force ?

Honnêtement, je suis très surprise de moi-même. Je suis très sensible, donc au début je me suis dit que ce cancer ça serait trop pour moi, que j’allais pas réussir à rebondir. Je me suis révélée une âme de battante que je soupçonnais absolument pas chez moi. Par exemple avec ma coupe de cheveux, j’ai toujours eu les cheveux très longs, même pour l’élection des Miss, j’avais pas voulu  les couper. Quand je les ai rasés je pensais vraiment m’effondrer, et au final pas du tout. Je suis allée me maquiller pour faire des photos avec ma sœur et ça allait mieux. J’ai hésité à poster les photos de ma tête sans mes cheveux longs sur Instagram, et au final j’ai passé le cap et j’ai reçu plein de compliments !

Bien sûr, j’ai été très soutenue par mes proches. Ma mère a été très présente, elle faisait tous les allers retours à l’hôpital, m’apportait chaque repas pour que je continue à manger, se pliait en quatre pour moi. Ma sœur et mon père ont aussi été là. Avec mon copain, on est en relation à distance et on est très jeunes, pourtant il m’a pas lâchée. J’ai pas passé une nuit seule à l’hôpital, il y avait toujours quelqu’un avec moi. J’avais tout le temps des visites. J’ai eu de la chance aussi avec l’équipe médicale, je me suis liée d’amitié avec certaines aides-soignantes, on se voit parfois à l’extérieur. L’entourage a tout changé pour moi. Mais mon fort caractère et mon humour n’y sont pas pour rien non plus. J’invente des délires avec la chimio, je rigole de moi-même, je m’appelais le petit kiwi, avec juste quelques poils sur la tête. Toutes ces petites choses contribuent au fait que j’ai réussi à me battre.

Malgré les longues journées d’hospitalisation, sa famille a toujours été présente . Crédit photo : Louise

Justement, à qui as-tu d’abord confié tes craintes ?

En fait, tout du long j’ai essayé de faire bonne figure avec mes proches parce que je me dis que s’ils voient que je me morfonds pas, eux aussi iront bien. Je les protège du mieux que je peux. Au début ma devise c’est : montrer que ça m’atteint pas. Après j’ai été suivie psychologiquement au centre et mes proches aussi. Ça m’a fait du bien de me livrer, de mettre des mots sur mes émotions.

J’ai commencé à me confier à mes proches pendant les chimio. Jusqu’à dire à mon copain que je pensais que j’allais mourir. Je n’aurais peut-être pas dû, mais c’est ce que je ressentais. J’étais tellement mal que c’était compliqué de le garder pour moi, mais c’est pas des choses à dire. Mes proches ne se confient pas à moi parce qu’ils veulent pas me stresser davantage. Donc j’attends que ça soit terminé pour échanger vraiment avec eux, savoir ce qu’il s’est passé dans leurs têtes.

Comment as-tu vécu l’annonce de ton cancer ?

Habituellement, je suis très anxieuse mais sur ce coup-là pas du tout. Le 24 septembre, je me rends au cabinet de la gynécologue qui m’avait opérée du kyste, pour un check-up. Ma mère a demandé si elle pouvait m’accompagner et la gynéco lui a répondu « oui je suis contente que vous soyez là ». J’ai pas du tout capté cette phrase mais avec le recul, ma mère m’a dit qu’elle avait tout de suite compris que ça n’irait pas. La gynéco a pas tourné autour du pot. Quand on s’est assises, elle nous a dit que les résultats n’étaient pas bons. Au final c’était pas un kyste mais une tumeur de 4 cm.

Je pleure pas tout de suite. Ma mère s’effondre. En fait je réalise pas, tout se bouscule dans ma tête. Je n’écoutais pas tout ce qu’expliquait la gynéco, la seule chose que j’avais en tête c’est : est-ce que je vais mourir ? Et j’ai directement posé la question. La gynéco, elle, voulait vraiment me rassurer en me disant qu’on en n’était pas encore là.

En rentrant, on a dû l’annoncer à mon père… C’étaient vraiment les minutes les plus compliquées. Puis j’appelle mon copain qui tombe en pleurs, pareil pour ma sœur, enfin, tout le monde pleure. C’était très dur, mais j’essayais de positiver, de leur dire que c’était pris à temps. Mais je n’avais pas de certitude.

Quel est le cancer dont tu es atteinte exactement ?

Il s’agit d’une tumeur maligne du sac vitellin. C’est la même chose que pour le cancer des testicules, c’est beaucoup plus répandu chez les hommes. Chez les femmes ça représente peu de patientes. L’équipe médicale en rigolait et moi aussi j’en faisais de l’autodérision.

« On me disait souvent tu es exceptionnelle Louise, car ma tumeur était rare ».

Louise partage son quotidien sur les réseaux. Crédit photo : Louise

Grâce à la rareté de sa tumeur, Louise est prise en charge rapidement à l’Institut Bergonnier, spécialisé dans le cancer à Bordeaux. Pourtant, l’opération initialement prévue début octobre n’aura pas lieu. D’abord décalée par le chirurgien, elle est finalement annulée car l’état de santé de Louise se dégrade. En retournant à l’hôpital de toute urgence pour des douleurs abdominales et de la fièvre, on lui diagnostique de l’ascite dans le ventre, un liquide infectieux qui peut être provoqué par un cancer. Sa tumeur était passée de 4 à 13 cm, et d’autres s’étaient propagées dans le péritoine. Louise doit bénéficier d’une chimiothérapie le plus vite possible. 4 cycles, de 3 semaines chacun, entrecoupés de courtes périodes à la maison. La jeune femme vit assez mal ces retours ponctuels: « A l’hôpital j’étais dans une bulle, revenir dans un endroit que je connaissais a marqué la réalité. Je me suis vue malade, incapable de profiter de ma maison comme d’habitude. C’est bizarre, j’avais hâte de rentrer chez moi et une fois que j’y étais, j’avais peur de pas avoir toute l’aide dont j’avais besoin en cas de problème. ». A noël, elle obtient une permission pour passer les fêtes en famille, et fait son retour définitif à la maison le 3 janvier.

A quoi ressemble ta vie aujourd’hui, quel est ton état d’esprit par rapport à la maladie  ?

Je suis assez fière de moi, parce que je reviens quand même de loin. Évidemment, j’ai des moments de gros stress, comme quand j’attends des résultats d’analyses. Mais j’essaye de me concentrer sur ma famille et je m’oblige à être occupée pour pas penser. Ça change quand même des choses d’avoir un cancer, on se concentre sur le principal. J’essaye de vivre au jour le jour, je peux pas me projeter, me dire tiens l’été prochain je pars aux Caraïbes ! Mais je veux positiver au maximum, profiter de chaque moment. Avancer pour que tout ça soit derrière moi. 

Même si c’est pas évident de se battre contre un cancer et qu’on tombe de dix étages quand on reçoit la nouvelle, il faut garder espoir et ne pas hésiter à demander de l’aide. C’est en partie pour cela que je partage mon témoignage sur Instagram. On peut vraiment se renfermer rapidement donc il faut prendre tout le soutien qu’on nous donne, celui de l’équipe médicale comme celui de nos proches. Je les remercie tous énormément.

Depuis notre entretien, Louise a été opérée et aujourd’hui, elle réalise une nouvelle chimiothérapie pour éliminer les dernières souches cancéreuses. Elle continue à prendre la parole sur ses réseaux sociaux pour mettre en lumière cette maladie parfois taboue. Pour l’aider dans son combat, Louise a aussi adopté un golden retriever. Tout sourire quand elle la présente à ses internautes, elle précise qu’elle n’a pas choisi son nom par hasard. En grec, Brona signifie “qui apporte la victoire”.

 


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